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L’ARTEFACT

Pour une adolescente de treize ans née sur Mars, trouver des amis n’est pas chose facile. Elinn eut l’impression d’avoir perdu les rares qu’elle avait lorsque, alitée à l’infirmerie, elle ouvrit les yeux et aperçut la rangée de visages familiers massés à son chevet.

Ronny, par exemple, semblait prêt à fondre sur elle pour la dévorer. Avec son nez en trompette et ses boucles blondes ébouriffées, c’en était presque comique. Il ne destinait ce regard assassin qu’à ceux qui se risquaient à l’appeler par son véritable nom, Ronald, qu’il détestait. Ou ceux qui avaient le malheur d’évoquer son statut de benjamin parmi les enfants de Mars. Un benjamin du reste peu ordinaire, dans la mesure où il était né sur Terre et avait migré sur la planète rouge avec ses parents alors qu’il était encore nourrisson – ce qui, de son point de vue, faisait de lui le plus jeune astronaute de tous les temps.

Ariana ne paraissait guère mieux disposée, le front barré par une ride verticale qui surgissait quand elle était passablement en rogne, pour ne pas dire au bord de l’explosion. Face à ce froncement de sourcils, l’attitude la plus sage consistait à battre discrètement en retraite, car, outre qu’elle était la plus forte, la plus rapide et la plus athlétique du groupe, Ariana se défendait également en arts martiaux, jiu-jitsu et karaté notamment. Mieux valait donc ne pas s’y frotter. Pour l’heure, ses longs cheveux noirs étaient tellement hirsutes qu’on aurait dit qu’elle venait de liquider un adversaire et brûlait de s’attaquer au suivant. D’ordinaire, elle était un peu la grande sœur d’Elinn. D’ordinaire, mais manifestement pas en ce moment.

Le docteur Dejones, père d’Ariana, l’observait avec sérieux, sans colère. Enserrant son poignet, il lui tâtait le pouls et hocha la tête lorsqu’elle le dévisagea.

Cari, quant à lui, semblait s’interroger. Devait-il se montrer furieux de ce qui s’était passé ou soulagé qu’on l’ait retrouvée à temps ? Les deux sentiments se lisaient sur ses traits. En sa qualité de grand frère, il s’était toujours cru tenu de veiller sur elle, en particulier depuis que papa était mort. Du haut de ses quinze ans, Cari était l’aîné des enfants de Mars. Sur Terre, il figurait déjà dans les livres d’histoire comme le premier humain né sur la planète rouge. Loin d’en concevoir une quelconque fierté, cela avait plutôt tendance à l’agacer. Son rêve, ainsi qu’il l’avait confié à Elinn, était de partir étudier sur Terre et de se rendre célèbre, plus tard, en explorant les autres planètes du système solaire.

La seule qui la couvait d’un regard empli de tendresse – bien que terni par des rides soucieuses au coin des yeux –, c’était évidemment maman.

« Mon enfant, mon enfant ! » murmura-t-elle en secouant la tête.

Elinn esquissa un faible sourire. « C’était stupide, hein ?

— Oui. Très stupide.

— Tu as eu de la chance qu’IA-20 remarque ta disparition et donne aussitôt l’alerte, la réprimanda le docteur Dejones. À dix ou quinze minutes près, c’en était fait de toi. » Voyant maman frémir, il s’empressa d’ajouter : « Mais rassurez-vous, madame Faggan, votre fille est hors de danger. Je vais encore procéder à quelques examens de routine et vous pourrez la ramener chez vous dès ce soir.

— Oui. Merci. »

Cari retrouva un semblant de sourire.

La ride furibonde d’Ariana s’estompa.

Même Ronny poussa un vague soupir de soulagement.

Peut-être n’avait-elle pas perdu tous ses amis, finalement.

C’est alors que la porte de l’infirmerie s’ouvrit. Tom Pigrato, l’administrateur mandaté par le gouvernement de la Terre, entra dans la chambre.

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Cari nota que les adultes eux-mêmes tressaillirent. Leurs relations avec Pigrato étaient courtoises sans que nul ne l’appréciât réellement. Compte tenu du mépris qu’il affichait à leur égard, ce n’était que justice.

L’administrateur avait rejoint Mars deux ans plus tôt, mais la faible pesanteur qui y régnait paraissait l’indisposer comme au premier jour. Sa démarche bizarrement traînante, presque claudicante, résonnait dans les couloirs de la cité, laissant à chacun le temps de prendre la poudre d’escampette. Désireux de vivre en paix, les adolescents avaient également appris à éviter son regard quand il braquait sur eux deux petits yeux perçants. Monsieur Pigrato estimait en effet que la colonie martienne n’était pas un lieu de villégiature, mais une station de recherche où la « marmaille » n’avait pas sa place. Selon lui, le président Sanchez avait commis une grossière erreur en permettant à des enfants d’y voir le jour – une décision heureusement invalidée après ses quatre années à la tête de la Fédération. Sa tirade favorite, qu’il assénait à loisir à qui voulait bien l’entendre, tenait en ces mots : « Une base scientifique existe en Antarctique depuis cent cinquante ans, et il n’y est jamais né aucun bébé. Or, comparé à Mars, l’Antarctique est un véritable paradis tropical. »

Une affirmation partiellement inexacte. Dans la zone de Tharsis où était implantée la cité, les températures estivales frôlaient parfois les quatorze degrés Celsius, créant une canicule dont les savants exilés en Antarctique n’auraient osé rêver.

Durant les glaciales nuits d’hiver, en revanche, le mercure descendait fréquemment à moins cent trente. Cela pouvait se révéler très déplaisant, surtout lorsque des tempêtes de sable se mêlaient à la fête. L’Antarctique, il est vrai, ne connaissait pas ce type de phénomène.

Sentant poindre l’orage, les adolescents se dévisagèrent.

À leur grande surprise, pourtant, Pigrato resta muet. Comme s’il ne s’était rien passé d’important. Son regard n’était pas plus perçant que d’habitude, ses lèvres charnues semblaient même légèrement moins crispées. On aurait presque pu le croire de bonne humeur. Cependant, personne ne l’ayant jamais vu de bonne humeur, il était difficile d’en juger.

Il honora les adultes d’un signe de tête. « Madame Faggan, docteur Dejones. » Fait extraordinaire, il s’abaissa à saluer la « marmaille ». « Bonjour, les enfants. » Quand il eut atteint clopin-clopant le lit d’Elinn, il en saisit le montant. Depuis son arrivée sur Mars, l’anneau d’or glissé à son annulaire alimentait les spéculations : était-il possible que cette bague fût une alliance ? Était-il concevable qu’une femme ait accepté d’épouser un homme tel que Pigrato ? Si oui, pourquoi ne l’avait-elle pas accompagné ?

« Alors, jeune demoiselle, lança-t-il à l’adresse d’Elinn, comment te sens-tu ?

— Bien, merci, monsieur Pigrato », bredouilla-t-elle en s’enfonçant machinalement dans ses oreillers.

Cari baissa les yeux vers sa sœur. Elle était si pâle, si vulnérable. Sans sa crinière de feu, aussi rousse que le sol martien, elle se serait fondue dans les draps d’un blanc immaculé. Mais l’avait-il jamais vue autrement ? Du plus loin qu’il se souvenait, Elinn avait toujours ressemblé à une fée de légende, à peine de ce monde.

Et, pour être honnête, il lui arrivait de se conduire ainsi.

« À ce qu’on m’a dit, reprit Pigrato, tu peux une fois de plus te vanter d’avoir eu de la chance, hein ?

— Oui, monsieur Pigrato.

— Raconte-moi ce qui s’est passé. »

Cari vit Ariana inspirer et retenir son souffle. Ronny écarquilla des yeux comme des soucoupes. Le docteur Dejones lui-même se mordit les lèvres. L’heure de l’apocalypse avait sans doute sonné.

Elinn leva sur l’administrateur des yeux de chien battu. Elle ouvrit la bouche à plusieurs reprises et finit par balbutier : « Je ne sais plus très bien, monsieur Pigrato. Je… je n’avais pas remarqué que ma cartouche d’oxygène était à moitié vide.

— Mmh », fit Pigrato. Ses doigts, qui avaient lâché le montant du lit, tambourinaient silencieusement sur le métal éclatant. « J’ose espérer qu’à l’avenir tu feras plus attention.

— Oh oui ! répondit précipitamment Elinn.

— Promis ? »

Elle acquiesça vivement. « Promis.

— Bon. » Il lui adressa un dernier signe de tête, les traits voilés par une expression indéfinissable. Parler de sourire serait exagéré, mais cela s’en approchait. Comme Pigrato ignorait l’art du sourire, cela brouillait peut-être les pistes ? En tout cas, il la salua, fit de même avec le reste de l’assistance puis s’en fut. Qu’il se mette à siffloter gaiement dans le couloir ne les aurait pas surpris.

« Qu’est-ce qu’il lui prend ? s’exclama Ronny sitôt la porte refermée.

— Oui, c’est curieux, reconnut le docteur Dejones. Je ne l’ai encore jamais vu dans cet état.

— Il ne nous a même pas servi sa salade sur l’Antarctique, constata Ariana.

— Ni sa salade ni aucun amuse-gueule », renchérit Cari.

Sa mère se risqua enfin à exprimer ce que tous ressentaient : « Rien qu’à imaginer ce qui pourrait mettre quelqu’un comme Pigrato de bonne humeur, j’en ai froid dans le dos. »

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Tard ce soir-là, alors qu’il était sur le point de s’endormir, Cari entendit des pieds nus trottiner jusqu’à son lit et sa sœur se lova près de lui sous les draps. Elle ne l’avait pas fait depuis longtemps, mais après une journée comme celle qu’ils venaient de vivre… Il se roula sur le flanc et la prit dans ses bras. « Coucou, petite chanceuse, marmonna-t-il d’une voix assoupie.

— Cari ? chuchota Elinn avec excitation.

— Allez, dors. Il est sûrement affreusement tard…

— Mais il faut que je te montre quelque chose !

— Demain, d’accord ?

— J’ai trouvé un artefact aujourd’hui, dans le gouffre de Jefferson », insista Elinn.

Elle aurait tout aussi bien pu lui jeter un seau d’eau froide à la figure. Cari se redressa d’un bond, alluma sa lampe de chevet et regarda sa sœur d’un œil ahuri. « Pardon ?

— Euh…» Elle sourit timidement. « J’ai encore vu la lueur, tu sais ? Dans le gouffre de Jefferson. Et j’ai découvert ça. » Elle lui tendit sa trouvaille.

Cari secoua la tête, décontenancé. « Tu es vraiment folle à lier. » Il prit tout de même l’objet et le contempla.

Depuis qu’Elinn s’était aventurée pour la première fois à la surface de Mars, elle collectionnait ces pierres étranges – si tant est que ce fussent des pierres. Nul autre qu’elle n’avait jamais rien déniché de semblable. Elle en possédait désormais un rayonnage entier. Fragments de forme aplatie, les plus petits n’excédaient pas la taille d’un ongle et les plus gros, comme celui-ci, celle de la paume. Ils paraissaient modelés dans du verre précieux coloré. Certains scintillaient d’un éclat énigmatique tandis que d’autres présentaient des striures nuancées. Sur celui-ci se dessinait une sorte d’ébauche. Elinn les avait baptisés « artefacts » en référence aux « objets créés de main d’homme » du jargon archéologique paternel.

« Créées de main d’homme », ces pièces ne l’étaient pas. Des études menées en laboratoire avaient démontré qu’il s’agissait simplement de silicium fondu incrusté de minéraux. Elles n’en étaient pas moins splendides, de purs joyaux.

« Magnifique, non ? s’exalta Elinn.

— Oui. Bien sûr. Mais tu n’as pas le droit de risquer ta vie pour ça, Elinn. C’est parfaitement idiot.

— Oui, je sais. » Son regard se voila de tristesse, avant qu’une étincelle d’enthousiasme ne l’embrase à nouveau. « Tu vois le dessin qui apparaît ? Ce motif, là, on dirait vraiment une tête de lion, tu ne trouves pas ? En fait, c’est un paysage. Tu le vois ? »

Cari approcha le fragment de la lumière. Oui, en faisant preuve d’imagination, ce cratère au rebord escarpé pouvait effectivement évoquer la crinière d’un lion. Ces taches sombres – peut-être des cratères plus modestes –, deux yeux, et cette mesa sillonnée de ravins, les contours du nez et de la gueule du fauve. « Oui. C’est assez ressemblant.

— Éteins.

— Pour quoi faire ?

— Éteins, je te dis ! Juste une seconde.

— Bon, d’accord. » Il s’exécuta et allait rallumer lorsqu’il vit un point minuscule luire au cœur de l’artefact. Un point qui, dans l’obscurité, se nimbait d’un halo bleuté presque inquiétant.

« Tu le vois ? Tu vois le point ?

— Oui. » Il ralluma et tenta de déterminer l’emplacement exact de la mystérieuse trace. Sur la mesa, non loin du naseau droit. « Joli. Je me demande pourquoi tu es toujours la seule à mettre la main sur ces merveilles.

— Je te l’ai expliqué cent fois, protesta-t-elle. Ces artefacts ne traînent pas là par hasard. Les Martiens les y déposent et les font briller pour que je les découvre.

— Oui, oui, je sais.

— Et ceci est un plan censé nous conduire à leur ville souterraine. Le point lumineux en indique l’entrée. Il ne nous reste qu’à consulter une carte et nous trouverons les Martiens. »

Cari soupira, lâcha l’artefact et fixa sa sœur. Sa petite sœur, de deux ans sa cadette. À l’entendre parler ainsi, il était difficile de croire qu’elle avait déjà treize ans. En cet instant précis, elle ressemblait à la fillette de cinq ans qui, chaque nuit durant les mois qui avaient suivi la mort de leur père, se réfugiait en pleurs dans le lit de son aîné, hantée par des cauchemars où elle voyait le défunt égaré dans un labyrinthe sous le sol martien.

« Elinn, dit-il sérieusement, c’était de la fiction. Ces histoires de Martiens que papa nous racontait, il les inventait. »

Elle le dévisagea, au bord des larmes. « Non.

— Si, Elinn. Rappelle-toi : petits, nous tremblions de peur à la moindre tempête de poussière. Si papa s’installait avec nous près du poêle, s’il nous racontait ces récits captivants, c’était pour détourner notre attention. Comme il était archéologue et s’était intéressé, sur Terre, aux civilisations disparues, il a fabulé sur l’existence des Martiens.

— Il n’a pas fabulé. Je sais qu’ils existent. » Elle croisa les bras d’un air buté. « Pourquoi je trouverais tous ces artefacts, sinon ? Pourquoi je verrais cette lueur, hein ? »

Parce que tu adorais papa, songea Cari. Et parce que tu n’as toujours pas réussi à accepter sa disparition. Mais le lui dire aussi nettement eût été cruel. Même si c’était assurément la vérité. Lui-même ne pouvait s’empêcher de penser souvent à leur père.

 

« Écoute, esquiva-t-il, les gens du labo ont analysé certaines de tes pierres. Leur conclusion est sans appel : c’est du silicium, du silicium fondu. Probablement une espèce de verre volcanique jailli des entrailles de Mars il y a des millions d’années. Du Mons Ascraeus par exemple. Sachant qu’il culmine à dix mille mètres, c’est-à-dire plus haut que n’importe quel sommet terrestre, tu imagines la masse de roche liquide qu’il a dû répandre dans toute la région ? »

Elinn reprit l’artefact et le regarda tristement. Briser ses rêves était un crève-cœur pour Cari, mais il se devait d’être clair quand elle se mettait pareillement en danger. Son statut de grand frère l’obligeait à veiller sur elle.

« Tu crois ? insista-t-elle.

— Oui. »

Elle se blottit en soupirant dans la couverture, le fragment de verre niché contre son sein. « Si c’est le cas, il devrait y en avoir partout, non ?

— Oui, tu as raison. » Il éteignit et s’allongea. Il était éreinté. « Mais il doit y avoir une explication. J’ignore laquelle, c’est tout. Allez, dors maintenant.

— Okay. Bonne nuit.

— Bonne nuit. »

Mais Elinn ne s’endormit pas. Très agitée, elle ne cessait de se retourner et réveillait involontairement son frère dès qu’il commençait à sombrer.

« Cari ?

— Quoi ?

— On pourrait quand même chercher la tête de lion sur une carte, réfléchit-elle dans le noir. Enfin, voir s’il y a des cratères, des montagnes proches du dessin de l’artefact. On pourrait, non ?

— Si tu veux, grommela-t-il, somnolent. S’il n’y a que ça pour te tranquilliser, on passera demain à la salle des cartes.

— Génial. » Elinn s’emmitoufla dans un froufrou de draps. « Et on découvrira sûrement un grand secret.

— Sûrement, marmonna Cari. Dors. »

S’ils avaient soupçonné la nature du secret qu’ils s’apprêtaient effectivement à découvrir, sans doute ne seraient-ils pas tombés aussi paisiblement dans le sommeil.

Le projet Mars
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